La pauvreté recule au Niger mais reste essentiellement rurale (EHCVM-II)

L’Institut National de la Statistique (INS) a organisé, mercredi 20 décembre 2023 à l’hôtel Bravia de Niamey, un atelier de présentation et de dissémination des principaux résultats de la deuxième Enquête Harmonisée sur les Conditions de Vie des Ménages (EHCVM-II).

L’Enquête réalisée en 2021/2022 et qui fait suite à celle réalisée en 2018/2019 s’inscrit dans le cadre du Programme d’Harmonisation et de modernisation des Enquêtes sur les conditions de vie des ménages (PHMECV) dans les 8 pays de l’UEMOA, avec l’appui technique et financier de la Banque mondiale. Elle vise à mettre à jour les indicateurs de pauvreté; à mesurer les progrès réalisés dans la recherche de l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD) ; à permettre la mise à jour des indicateurs sociaux utilisés dans la formulation des politiques publiques visant à améliorer les conditions de vie des populations ainsi qu’à fournir des données pour l’analyse de l’évaluation des politiques publiques relatives à plusieurs domaines importants notamment l’éducation, la santé, l’emploi, la vulnérabilité aux chocs ou la dynamique de pauvreté. Il ressort des principaux résultats de l’EHCVM-II que la pauvreté a connu un recul au Niger durant la dernière décennie, en dépit de la persistance des défis dont certains ont été amplifiés ces dernières années par des chocs ainsi que des disparités régionales très prononcées sur certains aspects mis en lumière par l’enquête. De quoi permettre aux décideurs de disposer des données fiables et actualisées au moment où le Gouvernement est engagé dans la formulation d’un nouveau Programme de Résilience pour la Sauvegarde de la Patrie (PRSP) pour bâtir les bases d’un développement endogène du pays.

C’est le ministre délégué aux Finances, M. Moumouni Boubacar Saidou, qui a présidé la cérémonie officielle d’ouverture de l’atelier de présentation et de dissémination des principaux résultats de la seconde Enquête harmonisée sur les conditions de vie des ménages (EHCVM). La cérémonie s’est déroulée en présence du Sécretaire Général du Ministère des Finances, des cadres centraux du ministère et représentants d’institutions et départements sectoriels, le Représentant résident p.i de la Banque mondiale au Niger, le Président du Conseil d’administration ainsi que le Directeur général par intérim de l’INS ainsi que les Représentants des Partenaires techniques et Financiers (PTFs), du Bureau de l’Association des Chefs Traditionnels du Niger (ACTN), du Réseau des Journalistes pour le Développement de la Statistique au Niger (RJDSN) ainsi que de plusieurs invités.

La pauvreté en baisse malgré les défis et les chocs

Après les mots de bienvenue du Directeur général par intérim de l’INS, le Représentant résident p.i de la Banque mondiale au Niger a pris la parole pour situer le contexte, les enjeux ainsi que les grandes tendances de cette enquête sur les conditions de vie des ménages, « un précieux outil qui revêt une importance considérable car son objectif premier est de fournir des informations fiables et nécessaires à l’amélioration des conditions de vies des populations ». En ce sens, a rappelé M. Mohamed Nanzoul, « la Banque mondiale s’est engagée à aider les pays à éradiquer l’extrême pauvreté et à favoriser la prospérité sur une planète vivable et c’est ce qui rend cette initiative extrêmement cruciale pour notre mission ».

Selon les explications du Représentant de la Banque mondiale, « les résultats de cette enquête mettent en évidence une baisse significative du taux de pauvreté au Niger durant la dernière décennie ». Cependant, a-t-il fait remarquer, « les défis liés à la crise sanitaire qui a débuté en 2020 ont entrainé un arrêt préoccupant de ces progrès en 2021 avec le taux de pauvreté qui a stagné pour se situer légèrement à son niveau de 2018 », marquant une légère augmentation de 0,4 points de pourcentage. Aussi, a ajouté M. Nanzoul, « les disparités régionales continuent de persister, avec des écarts frappant allant jusqu’à 48 points de pourcentage entre des régions spécifiques ».  Par ailleurs, a-t-il poursuivi, « la pauvreté reste particulièrement répandue dans les zones rurales affectant de manière disproportionnée les ménages impliquées dans des activités agricoles et de l’élevage ».

Le représentant p.i de la Banque mondiale au Niger n’a pas manqué d’évoquer le contexte actuel que traverse le pays avec les sanctions économiques et financières qui vont certainement affecter négativement les conditions de vie des populations notamment en milieu urbain. Il a en ce sens mis en avant les prévisions de croissance du PIB pour l’année qui ont été revues à la baisse en raison de ce choc dont les effets n’ont certes pas été pris en compte par l’enquête qui a été réalisée en 2021 et 2022. Il a toutefois indiqué que les outils de suivi-évaluation permettront par la suite de prendre en compte l’impact de cette situation. M.  Mohamed Nanzoul a, à ce niveau, particulièrement salué la résilience dont a fait preuve le pays ainsi que les populations qui ont été durement affectées. Il a également assuré les autorités et les partenaires que « la Banque mondiale va continuer à accompagner le Niger dans le développement de ses capacités statistiques et la modernisation de son Système de Statistique National (SSN) afin d’améliorer de manière significative la prise de décision notamment en faveur des ménages pauvres et vulnérables ». Il a annoncé le financement prochain par la Banque mondiale, d’autres études dans le même registre.

Des données fiables, de qualité et mises à jour

Dans l’allocution qu’il a prononcée à cette occasion, le ministre délégué aux Finances a tenu, tout d’abord, à se féliciter de la présence massive des participants à l’atelier, ce qui témoigne de l’intérêt qu’ils accordent aux activités du Système Statistique National (SSN) en général et de l’Institut National de la Statistique (INS) en particulier. Le ministre Moumouni Boubacar Saidou a réitéré à cet effet tout l’intérêt particulier qu’accordent les plus Hautes autorités du pays à la statistique, « un outil précieux d’aide à la prise de décision ». En effet, a-t-il souligné, « aujourd’hui plus que par le passé, il n’y a aucun doute que chaque Etat, chaque gouvernement, chaque décideur a besoin d’informations statistiques fiables, de qualité et à jour, pour piloter la gestion de son développement en vue de l’inscrire dans une logique prospective positive et durable ». C’est pourquoi du reste, a d’ailleurs rappelé le ministre, le gouvernement actuel fait de la statistique un secteur stratégique et prioritaire car « les données de qualité jouent un rôle primordial dans la conception, la formulation, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des politiques publique ».

Abordant l’Enquête Harmonisée sur les Conditions de Vie des Ménages (EHCVM), objet du présenta atelier, le ministre délégué aux Finances a indiqué qu’elle a été initiée par la Commission de l’UEMOA, avec l’appui technique et financier de la Banque Mondiale et s’inscrit dans le cadre du sous-programme « Harmonisation et Modernisation des Enquêtes sur les Conditions de Vie des Ménages (PHMECV) » du Programme Statistique Régional (PSR-UEMOA) 2015-2020, adoptée en 2015 par les huit (08) pays membres. Selon le ministre, ce sous-programme a beaucoup contribué à la modernisation de la collecte des données sur le bien-être et les revenus des populations, en proposant des estimations harmonisées sur la pauvreté et les Objectifs de Développement Durable (ODD). Il a en ce sens déclaré que sa mise en œuvre répond à l’ambition du Gouvernement de bâtir un Système Statistique qui s’adapte de façon efficiente aux facteurs qui influencent notre environnement, dont notamment la forte demande d’indicateurs statistiques liée au suivi des agendas nationaux de développement et des engagements internationaux ; les avancées démocratiques et sociales de notre pays qui exigent une gestion axée sur les résultats des politiques publiques afin d’assurer l’obligation de reddition des comptes ; les nombreuses avancées techniques et technologiques qui révolutionnent actuellement le paysage de l’information et de la communication, ainsi que les nouveaux défis liés à la situation sécuritaire du pays et au changement climatique. « Toutes les mutations institutionnelles opérées, au sein de notre Système statistique au cours de ces dernières années participent effectivement de la volonté de nos dirigeants à réguler l’activité statistique en vue de répondre aux besoins des utilisateurs à travers une production statistique de qualité », a mis en évidence le ministre Moumouni Boubacar Saidou.

Des données précieuses pour la formulation du Programme de Résilience pour la Patrie (PRSP)

Dans son intervention, le ministre délégué aux Finances n’a pas manqué de souligner que la réalisation de ces enquêtes sur les conditions de vie des ménages a permis non seulement de renforcer les capacités des Instituts Nationaux de la Statistique (INS) des pays membres de l’UEMOA mais aussi de produire des indicateurs pertinents de qualité, comparables dans le temps et entre pays, permettant notamment d’apprécier les conditions de vie des ménages et la pauvreté au sein des populations. « C’est l’occasion pour moi de réaffirmer que les résultats de ces opérations vont fournir au Gouvernement des données actualisées pour servir de boussole pour la formulation et l’évaluation des politiques et programmes publiques », a déclaré le ministre Moumouni Boubacar Saidou qui a saisi l’occasion pour rappeler que le Gouvernement s’est engagé dans la formulation d’un Programme de Résilience pour la Sauvegarde la Patrie (PRSP) pour bâtir les bases d’un développement endogène du pays et les résultats de ces opérations seront d’une grande utilité pour servir de référence à la formulation de ce programme. Selon le ministre, la deuxième Enquête Harmonisée sur les Conditions de Vie des Ménages (EHCVM-II) fournit des indicateurs qui sont représentatifs aux niveaux national, régional et selon le milieu de résidence qu’il soit urbain ou rural ? Des indicateurs comparables à ceux obtenus lors de la 1ere EHCVM réalisée en 2018-2019 et des Enquêtes sur les Conditions de Vie des Ménages et l’Agriculture (ECVMA) réalisées par l’INS en 2011 et 2014. En terminant son allocution, le ministre Moumouni Boubacar Saidou a tenu à remercier les Partenaires techniques et financiers notamment la Banque mondiale pour leur appui constant en vue d’accompagner le gouvernement dans son programme de modernisation et de développement de la Statistique au Niger. Le ministre délégué aux Finances a également transmis sa gratitude à l’ensemble des acteurs qui se sont mobilisés dans la réalisation de l’opération.

Des indicateurs édifiants et représentatifs des conditions de vie des ménages au Niger

Peu après la cérémonie officielle d’ouverture, les travaux de l’atelier se sont poursuivis avec la présentation et le partage des principaux résultats de l’EHCVM-II qui ont notamment permis d’édifiés les participants sur le profil et les tendances de la pauvreté, les principaux indicateurs sociaux, l’agriculture et les conditions des ménages ainsi que l’élevage et les conditions des ménages.

Il convient de noter que l’EHCVM-II est une enquête statistique par sondage et stratifiée à deux degrés notamment les Zones de dénombrements (ZD) et les ménages. Les opérations de collecte de la première vague ont été menées du 17 novembre 2021 au 13 février 2022 et celles de la seconde vague du 3 juin 2022 au 31 aout 2022. Les résultats obtenus sont représentatifs au niveau national, au niveau du milieu de résidence et au niveau de chacune des 8 régions du pays.

Ainsi, il ressort des résultats-clés que sur les quatre millions de ménages estimées (4.135.089), avec une taille moyenne de 5,8 personnes par ménage, la proportion de la population âgée de moins de 15 ans est de 52,2% et celle de la population potentiellement active c’est-à-dire dont l’âge est compris entre 15 et 64 ans est de 44, 3%. Selon les résultats de l’enquête, 41, 2% des ménages au Niger sont pauvres soit une population estimée à un peu moins de 10 millions (9.932.800). En milieu rural le taux de pauvreté est de 46,2% et 18,9% en milieu urbain. Par ailleurs, l’enquête a fait ressortir que 80,7% des ménages sont propriétaires de leurs logements et 25% utilisent principalement l’électricité comme source d’éclairage.

Autres faits saillants des résultats, 35,6% des personnes âgées de 15 ou plus sont alphabétisées et le taux net de scolarisation au primaire (7-12 ans) est de 55,9% avec un taux brut de scolarisation au primaire de 75,7%.

Pour ce qui est de la situation de l’emploi et du chômage, le taux d’activité pour la population âgée de 15 ans à 64 ans est de 56, 1% avec 63,4% qui exercent dans le secteur primaire, 10,5% dans le secteur industriel et 32,8% dont la branche d’activité est l’agriculture. Comme le montre d’ailleurs les résultats de l’enquête, l’Agriculture est pratiquée par 73% des ménages soit une population estimée de plus de 3 millions et 68% pratiquent l’Elevage au Niger.

Après la présentation des résultats, des échanges et des débats enrichissants ont clôturé l’atelier.

(source: actuniger.com)

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