Morts de 37 migrants au Maroc, les associations de défense des droits humains exigent une enquête
Le décès tragique vendredi dernier de 37 migrants subsahariens dans une rixe avec la police de la frontière marocaine alors qu’ils tentaient de passer par Melilla pour atteindre l’Espagne défraie toujours la chronique. Un collectif d’associations de défense des droits de l’Homme a publié un communiqué dans lequel ils dénoncent les politiques d’externalisation des frontières de l’UE avec la complicité du Maroc.
Les 37 morts côté migrants à la frontière du Maroc alors qu’ils tentaient de rejoindre l’Espagne suscitent l’indignation de la communauté internationale. Voici en intégralité le communiqué rendu public par un collectif d’organisations de défense des droits humains.
Les 37 morts et les centaines de blessés du côté des migrants comme ceux du côté des forces d’ordre marocaines sont le tragique symbole de politiques européennes d’externalisation des frontières de l’Union européenne (UE), avec la complicité d’un pays du Sud, le Maroc. La mort de ces jeunes africains sur les frontières de la « forteresse européenne » alerte sur la nature mortifère de la coopération sécuritaire en matière d’immigration entre le Maroc et l’Espagne.
Les prémisses du drame de ce vendredi 24 juin ont été annoncés depuis plusieurs semaines. Les campagnes d’arrestations, de ratissages des campements, de déplacements forcés visant les personnes en migration à Nador et sa région étaient annonciatrices de ce drame écrit d’avance. La reprise de la coopération sécuritaire dans le domaine des migrations entre le Maroc et l’Espagne, en mars 2022, a eu pour conséquence directe la multiplication des actions coordonnées entre les deux pays.
Ces mesures sont marquées par des violations des droits humains des personnes en migration au nord (Nador, Tétouan et Tanger) comme au sud du Maroc (Laâyoune, Dakhla). Le drame de cette triste journée est la conséquence d’une pression planifiée contre les personnes exilées.
Depuis plus d’un an et demi, les personnes en migration à Nador sont privées d’accès aux médicaments, aux soins, voient leurs campements brûlés et leurs biens spoliés, leurs maigres denrées alimentaires détruits et même le peu d’eau potable qui est à leur disposition dans les campements, il est confisqué.
Ces expéditions punitives ont abouti à une spirale de violence des deux côtés. Une violence condamnable quel que soit ses origines, mais tout en rappelant la violence systémique que subissent les migrants à Nador depuis des années de la part des forces de l’ordre espagnoles comme marocaines. Des pratiques condamnées à de multiples reprises par des instances nationales, régionales et onusiennes.
Face à ce nouveau drame aux frontières, et compte tenu de l’ampleur du bilan humain qui sera amené, hélas, à être revu à la hausse, les organisations signataires de ce communiqué annonce ce qui suit :
- Nous exprimons nos vives condoléances aux familles des victimes, parmi les migrants comme dans les rangs des forces de l’ordre.
- Nous condamnons l’absence de prise en charge rapide des migrants blessés, qui a alourdit ce bilan. Nous exigeons qu’une prise en charge sanitaire adéquate et de qualité soit accordée à toutes les personnes hospitalisées à la suite de ce drame.
- Nous exigeons que les autorités marocaines procèdent à l’identification et à la restitution des dépouilles des victimes à leurs familles, en collaboration avec les communautés des migrants.
- Nous exigeons l’ouverture immédiate d’une enquête judiciaire indépendante du côté marocain comme espagnol, ainsi qu’au niveau international pour faire toute la lumière sur ce drame humain.
- Nous exigeons la fin des politiques criminelles financées par l’Union européenne et ses nombreux complices, les Etats, certaines organisations internationales et plusieurs organisations de la société civile qui assurent la sous-traitance de ces politiques criminelles.
- Nous appelons les représentations diplomatiques des pays africains, présentes au Maroc d’assumer pleinement leurs responsabilités en matière de protection de leurs ressortissants, au lieu d’être complices des politiques en cours.
- Nous appelons les organisations et les mouvements de défense de droits humains et de défense des droits des personnes en migration à se mobiliser dans ce moment critique où le droit de la vie est plus que jamais est danger.
Le 25 juin 2022, Rabat.
SIGNATAIRES :
La Plateforme des Associations et Communautés Subsahariennes au Maroc (P. ASCOMS)
Caminando Fronteras
ATTAC CADTM Maroc
Association d’aide aux migrants en situation de vulnérabilité- Maroc (AMSV)
AMDH/ L’Association Marocaine des Droits Humains